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Journal de Bord
Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
 

Le 27/07/2012
Publié le 27 août 2012 par Dann
Mardi 24 juillet, il fait chaud. Très chaud. Je commence à mal vivre les longues attentes au déco avec le casque, les gants, le blouson. Mais après ce magnifique semestre de vol libre, je suis gonflé à bloc. Je ne veux rien rater. J'aimerais bien monter encore de quelques crans dans le classement des pilotes du club...

La journée est annoncée fumante. Ok, j'en suis, comme on dit sur la liste. Pourtant je n'ai jamais aimé voler en plein été. Je trouve que le cerveau réagit plus lentement. La chaleur est souvent accablante. Les nuits sont courtes. Le sommeil pas toujours très réparateur. Et si en l'air il fait meilleur, les fois où ça veut bien monter, il n'en demeure pas moins qu'on prend de sacrés coups de chaud sur les sites. En plus je trouve que les conditions sont souvent teigneuses, malsaines. On me rétorquera que c'est un peu dans ma tête que ça se passe. Néanmoins j'ai souvent vu des "dusts" au mois d'août. D'accord, pas seulement au mois d'août...

Ce jour là nous sommes une douzaine, une quinzaine, peut-être même plus au décollage du Vissou. La plupart des pilotes dont les vols font l'admiration de tous transpirent à grosses gouttes, préparant leur matériel et blaguant comme à l'habitude. Moi, je suis super motivé. Je vole depuis plus de vingt ans. A l'époque où j'habitais au Touvet (au pied de Saint-Hil pour les rares qui ne connaissent pas) j'étais très assidu. Je ne comptais pas mes heures de vol avec ma Sigma 3. Chartreuse, Belledone et près d'une centaine d'autres sites dans toute la France.

Puis j'ai changé de boulot, puis de région. J'ai commencé à ne plus voler que de manière occasionnelle. Alors j'ai repris des ailes "standard". Cela me paraissait raisonnable. Allegra d'Apco, Buzz Z d'Ozone. En 2011, ayant réglé des problèmes de santé, je m'y suis remis. J'ai redécouvert la frustration du mec vaché à 5 km du déco qui voit passer ses potes au dessus de sa tête et qui, de rage, préfère couper sa radio et s'en remettre à l'auto-stop. En 2012, j'ai décidé de repasser sous Sigma. On en est à la Sigma 8...

Je suis en confiance

Un premier parapente décolle. Les conditions ne m'inspirent pas mais je suis prêt. Je le regarde filer vers l'Est. Il prend vite un peu de gaz et passe au dessus de la station météo. C'est suffisant pour me convaincre. J'envoie. Déco propre. Derrière moi ça décolle en rafale. J'ai volé une trentaine d'heures avec ma Sigma 8. Dont une belle semaine dans les Alpes avec Didier Exiga. Je suis en confiance. J'avance bien malgré un peu de yoyo. C'est normal, tendance Est.

Au moment de passer sur la face Sud-Est, je me trouve un peu trop bas pour basculer derrière. Demi-tour. Et là tout commence à aller très vite. J'ai l'impression d'être accéléré à fond. Mon aile a l'air de ne pas me porter. Je rase les arbres. J'en touche un, puis deux. C'est beaucoup. Je m'éloigne dare-dare du relief. Je suis déjà en situation de travailler ma prise de terrain pour un atterrissage sans honneur. Pourquoi je m'acharne ? Probablement parce que je compte sur les performances de mon aile. Je vais chercher plus loin, trop loin. Je ne trouve rien.

Quand je fais demi-tour, je constate que je ne pourrai pas rentrer. En plus il y a ce ruisseau à sec avec ses flans rocailleux. Pas envie de taper dedans. Pas grave, je vais poser avant. Dernier virage, le plus à plat possible. Je dois être à 10 mètres/sol. Il me suffira de passer par dessus cet arbrisseau. Derrière, il y a assez de place. Ce sera sûrement un peu brutal, pas de problème, je gère. Tout à coup, dans le virage, l'aile pique comme si j'avais enfoncé la commande à fond, et elle accélère comme si j'étais vent de cul. Cela ne me semble pas logique du tout, je devrais avoir au minimum un petit flux de travers. Je suis bien vent de cul.

En fait d'arbrisseau, j'ai affaire à un bel adulte. Disons un jeune adulte râblé. Il ne mesure pas plus de 2,5 mètres de haut. Son tronc fait près 20 centimètres de diamètre. Les deux pieds en avant, je m'écrase littéralement sous le branchage, à quelques centimètres seulement du dit tronc. Et ma tête ne heurte aucune branche épaisse. L'aile passe gentiment par dessus, les suspentes proprement alignées de part et d'autre.

L'impression d'avoir raté ma chance

Un simple incident. Je n'ai mal nulle part. Je me relève aussitôt, dégage assez rapidement mon matériel des ronces. En l'espace de quelques minutes cinq pilotes se sont posés en bas. Juste après moi. Mauvais cycle. Les boules. Ne pas lever la tête. Ne pas observer le balai des ailes qui enroulent le thermique et disparaissent tour à tour vers le Nord-Ouest. Remonter à pieds sous le cagnard avec mes vingt kilos sur le dos. Un simple incident. Pas le premier d'ailleurs, mais mon premier arbre, si court-sur-pattes soit-il. J'ai déjà amerri. J'ai à mon actif toutes sortes de posés fortement audacieux. Mais c'est mon premier arbre. Et il fait si chaud.

En remontant, mon cerveau fonctionne au ralenti. Je dois être un peu choqué. Un coup de chaud peut-être. Ou bien les deux. Le soir je passe quelques coups de fil pour prendre des nouvelles des copains. La suite, vous la connaissez : record du site pour trois pilotes avec plus de 150 km. Sans compter quelques scores très honorables. J'ai un peu l'impression d'avoir raté ma chance.

Comme on dit aujourd'hui, je suis un peu deg. Et il fait chaud, trop chaud. Je décide de faire un break. De ruminer cet épisode et d'en tirer les bonnes conclusions. Elles s'imposent d'elles-mêmes : plage, piscine, siestes, méditation. La sortie dans le Vercors ? Je ne la sens pas. C'est dommage mais quelque chose me dit que certains jours, on ferait mieux de rester chez soi. Et j'ai justement l'impression que ces jours d'été 2012 en font partie. Juste une impression. Nager 2 km par jour me semble être une option plus appropriée.

Ma petite voix intérieure

A l'heure où j'écris ces lignes, nous sommes un bon mois après cette journée mémorable. Un très bon pote à moi s'est planté vers le lac de Serre-Ponçon il y a trois semaines. Un bon pilote, un montagnard, un crosseur aguerri. Aujourd'hui et pour quelques mois encore un esprit sain dans un corset, selon la célèbre maxime du milieu. Et puis il y a eu la mort de la présidente du club des Ailes de la Séranne, que je ne connaissais pas personnellement, mais que j'aurais certainement rencontré un jour ou l'autre. Et puis un autre message tragique sur la liste. Quelqu'un que je ne connaissais pas non plus. Et puis, aujourd'hui même, l'annonce de l'accident très grave d'un autre membre de notre club.

Pendant ce mois, j'ai lu les messages sur la liste de diffusion, surveillé les traces GPS sur le site de la CFD. Aucun déclic pour me rendre aux points de rendez-vous. Comme si mon esprit avait reporté le goût de voler à un peu plus tard, quand il fera moins chaud. Ma petite voix intérieure... C'est idiot, je sais. Limite superstitieux. Mais j'en suis bien content. Alors je ne tire aucune morale de tout cela. J'espère seulement qu'au fil des années je saurai m'écouter et me méfier d'une trop grande confiance en moi. Me méfier aussi des moments où, les heures de vol aidant, je ne me méfie plus assez. Où entraîné par l'amicale émulation au sein du club je décolle dans des conditions limites. Certes pour des vols parfois magnifiques...

Cette appréhension sourde qui nous fait parfois rester au sol, qui nous dit : « fais plutôt quelques récups aujourd'hui », ou encore : « reste chez toi, c'est très bien ici », cette petite voix intérieure, je la remercie pour ces belles journées d'été passées en famille.

Dann



Les images jointes



Ce qu'ils en pensent ...
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 27 août 2012 par Pascal W
+1 ... il faut toujours suivre sa voie intérieure.
 
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 27 août 2012 par cricri
j'aime ce que tu écris Dann et l'applique pour moi...à bientôt sur les décos ! Christian Bidaud
 
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 27 août 2012 par Pierre L
Bien dit bien ecrit et bien ressenti vivement l'automne Pierre
 
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 27 août 2012 par PIerre-André P

Merci pour ce très joli texte. Je pense que beaucoup se reconnaîtront dans ce récit, chacun avec sa propre mesure des choses... Mais je ne suis pas d'accord avec toi sur un point. Tu dis "j'ai l'impression d'avoir raté ma chance"... Je pense plutôt que la chance était là et que tu en as pleinement bénéficié... et tu le dis très bien d'ailleurs " Je n'ai mal nulle part. Je me relève aussitôt, dégage assez rapidement mon matériel des ronces." Et puis, plus simplement, même au sol n'est-ce pas une chance extraordinaire que de lever la tête, regarder voler les copains, sentir le vent et le soleil sur sa figure et se dire qu'on ira voler très bientôt... demain, après demain, la semaine prochaine ou le mois suivant... mais on y sera... Comme tu le précises, ces derniers jours ont été durs, très durs, une saison triste ici et ailleurs...le ciel est sombre malgré le soleil. Il nous faut nous interroger sur notre pratique, notre manière d'être au sol et en l'air... Personnellement je me dis que j'ai de la chance de pouvoir voler...un plouf, un vol un peu plus long,... peu importe... cette chance d'être en l'air est la même... il faut juste la reconnaître et tenter de ne pas aller au delà sous peine de la perdre. Et puis parfois on est un peu limite avec elle, là aussi il faut savoir le voir. Ce soir je disais à mon kiné que j'étais finalement content de ne m'être fait qu'une cheville (un atterro pas top dans des conditions difficiles il y a 3 semaines à Passy dans le 74)... une chance même ( ? ? ?) car dans quelques temps je pourrais revoler. Quelle chance !

… Notre petite voix intérieure et la chance sont bonnes copines … ne l'oublions pas ...

Si vous avez la chance d'aller voler, alors volez prudemment !

Pierre-André (PAP)

 
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 27 août 2012 par Christian G

Salut Dan,

Merci pour ton texte, pour ce texte qui n'omet rien des plaisirs et des moments limites parfois du parapente. Qui n'omet rien de ces moments personnels où on ne sent pas les choses où l'hésitation devient indicative, pour qui sait l'entendre, d'un temps d'arrêt, de repos et proprement parler de réflexion. Où on arrive alors à se défaire de l'attraction des autres quelle que soit leur expérience et l'effet d'émulation que cela produit chez chacun d'entre nous. Associer à cela la réalité des accidents des proches et la douleur discrète qui s'y rattache, c'est aussi reconnaître avec sagesse et humilité que les plaisirs que l'on a pu avoir de voler restent une expérience toujours étonnante, mais qui n'est pas automatiquement reconductible. Il faut et nous le savons tous, à chaque fois être au plus près des bonnes conditions internes et externes pour reconstruire une séquence de vol, seul ou en groupe, rebâtir à chaque fois de tels instants et qui ne sont vraiment vécus que lorsque le vol s'arrête, que l'on replie la voile et qu'on se fait le film, que l'on peut en parler à d'autres ou en écrire.

Bien amicalement

Christian G.

 
> Parfois, on ferait mieux de rester chez soi
Rédigé le 28 août 2012 par Gilles M
Je découvre ton texte qui résume bien les pensées et surtout les doutes des parapentistes.Il est difficile de concilier prudence avec passion, mais la raison dois l'emporter si l'on veut continuer à la pratiquer. Pas facile car l'émulation parfois aurait tendance à nous pousser. Alors prenons du recul et sachons déguster les instants présents. A très bientôt pour des vols super sympas Gilles
 
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